Pain blanc ou pain intégral ?

Le bon pain est-il noir ou blanc ?

André Astrié – Faire notre pain, pourquoi, comment ? – Octobre 2006 – Editions LPA


Voyons tout d’abord comment est fait un grain de blé. On peut distinguer trois parties : les enveloppes, l’amande et le germe. Les enveloppes se divisant en enveloppes externes (péricarpe) et enveloppes internes (tégument séminal, bande hyaline et assise Protéique).

Aussi loin que l’on puisse remonter dans l’histoire de l’humanité, on constate que nos ancêtres ont toujours recherché à éliminer l’enveloppe cellulosique (péricarpe) des graines de céréales, base de leur alimentation. Les procédés de mouture utilisés jusqu’à la fin du siècle dernier (moulins traditionnels) ne permettaient cette séparation qu’imparfaitement. Le taux d’extraction ne dépassait sauvent pas 50%, la farine ainsi obtenue était évidement réservée aux riches, le commun des mortels devant se contenter de farines non tamisées.

L’invention de la mouture par cylindres et les “progrès” de l’agriculture devaient révolutionner cet état de fait. Il devenait dorénavant possible de séparer l’amande d’une part du germe et des enveloppes d’autre part dans d’excellentes conditions économiques et techniques. On obtenait ainsi une farine très blanche totalement exempte de “souillures”. Le succès de la farine de cylindre et donc du pain blanc fut foudroyant, ce dernier devenant accessible à tous.

On venait de passer une première fois d’un extrême à l’autre. Le pain obtenu était carencé en vitamines, sels minéraux et diastases. La panification sur levure devait porter le coup de grâce en rendant le pain parfaitement insipide et de mauvaise conservation. La consommation devait chuter de la façon que l’on sait.

On connait maintenant depuis une vingtaine d’années un mouvement contraire, basé soit sur des travaux scientifiques, soit sur des théories échafaudées par les fondateurs de diverses écoles de médecine naturelle et de diététique qui tous mettent en évidence la nocivité du pain blanc et conseillent la consommation de pain complet ou même intégral. Une deuxième fois, nous voila passant d’un extrême à l’autre.

Nous ne reviendrons pas ici sur le caractère profondément nocif du pain blanc. Par contre, nous rappellerons les dangers liés à la consommation régulière de son (péricarpe). Le son est tout d’abord parfaitement incomestible.

Chacun pourra de fait en examinant ses selles après en avoir ingurgité. C’est évident et facile à vérifier qu’il provoque une vive accélération du transit intestinal qui diminue considérablement 1’assimilation.

Il est par contre plus long, plus difficile et plus dangereux de vérifier sur soi-même l’effet rachitigène. Heureusement, le fait étant bien établi, cette expérimentation n’est nullement nécessaire.

Attardons nous un instant sur ce point car il s’ agit là du plus grave danger de la consommation de son. Le péricarpe contient une substance appelée acide phytique qui se combine dans les intestins avec le calcium et le fer du bol alimentaire et des sécrétions digestives pour former des substances
insolubles éliminées dans les selles.

Les partisans de la consommation de son (nombreux dans le monde de la diététique bio) prétendent que l’acide phytique est détruit lors de la fermentation panaire. Cela n’est vrai que dans une certaine mesure et sous certaines conditions. La fermentation doit être naturelle (levain naturel) et longue.

Les résidus d’acide phytique sont inversement proportionnels à la durée de fermentation, cette dernière devant se prolonger pendant au moins une douzaine d’heures pour obtenir l’élimination de l’acide phytique. En pratique, il est difficile d’obtenir du bon pain avec une fermentation si longue.
En admettant que le levain ne pourrisse pas, le pain serait beaucoup trop acide.

De plus, les phytases chargées de neutraliser l’acide phytique ne peuvent être libérées que par une mouture lente et très soigneuse à la meule de pierre. Il faut savoir que la plus grande partie des pains complets ou intégraux du commerce sont fabriqués à partir de farines de cylindres ou pire de broyeurs.

Enfin, quand bien même l’on disposerait de farine de meules de qualité, si la proportion de son est trop forte (cas du pain intégral), les phytases ne peuvent venir à bout de l’acide phytique.

Remarquons au passage les dangers liés à la consommation régulière de farine complète sous forme non fermentée, de pâtes, de couscous et semoule complets ainsi que des flocons de céréales.